Le sport pendant la grossesse

Par Clément Dubal, éducateur médico-sportif au sein du réseau de santé Pôle APSA


Vous savez déjà que l’activité physique est bonne pour la santé. Qu’en est-il pendant la grossesse ? Est-ce que les femmes enceintes doivent arrêter de faire du sport ? Y a-t-il une manière sécurisante de faire de l’exercice qui serait plus profitable pour la femme et son bébé ? On ne peut pas tout faire comme avant. Vous avez raison de vous interroger sur la place que doit occuper l’activité physique pendant cette période de la vie.


 


8 CHANGEMENTS PHYSIOLOGIQUES LIÉS À LA GROSSESSE

La grossesse n’est pas une maladie. C’est une étape de la vie qui présente de grands bouleversements hormonaux et mécaniques dans l’organisme.


Voici 8 changements physiologiques liés à la grossesse :

  1. La femme se sent plus facilement essoufflée car les besoins en oxygène de l’organisme augmentent.
  2. Le cœur bat plus rapidement : la fréquence cardiaque de repos augmente d’environ 10 à 20 battements par minute.
  3. L ors d’un effort, bien souvent le cœur ne peut plus battre aussi vite qu’avant la grossesse.
  4. À partir de la 24e semaine de grossesse, en position allongée sur le dos, l’utérus peut comprimer la veine cave et limiter ainsi le retour veineux.
  5. Le centre de gravité du corps de la femme est décalé vers l’avant à cause de l’augmentation du volume de l’abdomen. Ce n’est pas sans conséquence puisqu’il en résulte des troubles au niveau du dos et des abdominaux. Ces phénomènes réduisent la stabilité du tronc, perturbent l’équilibre de la femme et peuvent être à l’origine de douleurs dorsales et pelviennes.
  6. Le risque de blessures musculo-squelettiques augmente. En effet, le gain de poids lié à la grossesse augmente les contraintes au niveau du squelette, des muscles, des articulations et des ligaments. Les changements hormonaux décuplent la laxité ligamentaire et articulaire.
  7. Le métabolisme de base augmente avec une élévation de la température corporelle.
  8. L’incontinence urinaire est fréquente pendant et après une grossesse. Elle peut être secondaire à des lésions des muscles du périnée, du tissu conjonctif ou des nerfs périphériques, en lien avec la grossesse ou l’accouchement.


MÉFIEZ-VOUS DE LA SÉDENTARITÉ

Encore beaucoup de femmes et d’hommes pensent que la grossesse doit être un temps où il faut « rester tranquille » pour réduire le risque de fausse couche et de complications néonatales. Or, on sait aujourd’hui qu’une activité physique adaptée à la situation de la femme enceinte ne présente aucun risque pour la santé du fœtus, bien au contraire.


C’est l’inactivité physique que les femmes enceintes doivent craindre, et non l’exercice !


Voici quelques-uns des problèmes auxquels elles s’exposent si elles ne font pas régulièrement une activité physique :

  • Détérioration de la condition physique : essoufflement plus marqué, moins de flexibilité, d’agilité et d’équilibre, posture inconfortable
  • Fatigue plus intense.
  • Gain de poids excessif, particulièrement au troisième trimestre de la grossesse
  • Risque accru de :
  • diabète gestationnel
  • hypertension
  • prééclampsie (état d’hypertension soutenu en période de grossesse)
  • maux de dos
  • plus grande difficulté à se remettre de l’accouchement.



9 EFFETS BÉNÉFIQUES DE L’ACTIVITÉ PHYSIQUE CHEZ LA FEMME ENCEINTE

On sait maintenant qu’un mode de vie physiquement actif réduit les risques de problèmes sur la santé maternelle, foetale et néonatale.


Voici 9 effets bénéfiques de l’activité physique pendant la grossesse :

  1. Maintien ou amélioration de la condition physique.
  2. Prévention d’une prise de poids excessive pendant la grossesse et aide à la perte de poids en postpartum
  3. Prévention possible du diabète gestationnel
  4. Prévention de l’hypertension gestationnelle
  5. Prévention de la prééclampsie
  6. Réduction des poids excessifs à la naissance
  7. Diminution possible du recours nécessaire à la césarienne
  8. Diminution des douleurs lombaires et pelviennes lors de la grossesse. L’activité physique ne prévient pas l’apparition de ces douleurs, mais elle en diminue l’intensité et améliore la tolérance.
  9. Diminution du risque d’incontinence urinaire lors de La grossesse et en post-partum. Les études sur les effets du renforcement musculaire montrent par exemple que des exercices du plancher pelvien permettent une réduction de 50 % des incontinences urinaires prénatales.


AVANT DE DÉBUTER, FAIRE UN BILAN

Avant que la femme enceinte ne se mette à l’exercice, il est préférable de toujours demander conseil à son médecin et/ou sage-femme. Même si cela est peu fréquent, il peut y avoir des contre-indications.. Si vous êtes plutôt du genre sédentaire, il n’est pas trop tard pour mettre plus de mouvement dans votre vie. Dans tous les cas, sportive ou non et quelle que soit l’activité, ne dérogez jamais à cette règle : écoutez vous et arrêtez-vous à la moindre gêne. C’est vous qui décidez de ce que vous pouvez faire. L’essentiel est de ne pas rester inactive.


QUELS TYPES D’ACTIVITÉS ?

Activités conseillées :

  • En dehors de contre-indications médicales et obstétricales, la majorité des femmes enceintes peuvent effectuer des activités physiques. en endurance en renforcement musculaire en toute sécurité pour elles et pour le fœtus..
  • La marche est une des activités par excellence pendant la grossesse. À réaliser de préférence sur terrain facile (pour éviter le risque de chute) et sous un climat tempéré. Pratiquez-la si possible dans un endroit bien aéré, afin d’absorber facilement les 25% d’oxygène supplémentaire dont la femme enceinte a besoin
  • Les activités de renforcement musculaire, comme par exemple la gymnastique douce, le yoga et le pilates améliorent la position du corps, préviennent les douleurs du bas du dos, préparent les muscles et articulations du bassin à l’accouchement. Ces activités aident aussi à soutenir la charge en lien avec la prise de poids, favorisent le retour veineux des membres inférieurs tout en améliorant le contrôle de la vessie et préviennent l’incontinence urinaire. Respirez profondément pendant les exercices et évitez au maximum de bloquer votre respiration.
  • L’aquagym et la natation sont aussi des activités recommandées sous condition que l’eau ne soit pas trop froide (température idéale entre 22 et 24°C). Elles renforcent les muscles du ventre, du dos, des reins et des cuisses tout en assouplissant le périnée. Vous pouvez nager pendant toute la grossesse si le col n’est pas entrouvert. Préférez la brasse, le dos crawlé et la nage indienne.


Activités déconseillées :


De manière générale, ce sont tous les sports violents, qui entraînent des chocs ou des secousses ainsi que les activités à fort risque de chutes..

  • Les sauts sont déconseillés à cause des possibles chutes et du stress supplémentaire sur le périnée. Il est donc plutôt déconseillé de courir après le 1er trimestre de grossesse.
  • Ce n’est pas le moment de développer la souplesse de la femme enceinte : les risques de blessure sont plus importants à cause d’une hormone de grossesse qui détend les ligaments : la relaxine. Alors c’est possible de s’étirer, mais sans jamais forcer et sans vouloir progresser pendant cette période.
  • Les exercices physiques allongés sur le dos doivent être évités après la 24e semaine d’aménorrhée car l’utérus peut comprimer la veine cave et limiter ainsi le retour veineux.
  • Évitez de travailler les grands droits des abdominaux ( ceux qui font les tablettes de chocolats). Pendant la grossesse, ces muscles s’écartent pour laisser la place à l’utérus. Or, si on les sollicite pendant cette période, ils vont mal se contracter, et surtout se contracter asymétriquement. Après l’accouchement, ils risquent de ne pas se remettre ensemble correctement.
  • Certains sports sont à bannir, tels que la plongée, le ski, tous les sports de contact, collectifs et les sports où il y a un risque de chute. Les activités sportives doivent être évitées au-delà de 2 500 mètres d’altitude.
  • Les activités physiques réalisés dans des. environnements chauds et humides doivent être si possible évitées. Une hydratation très régulière et le port de vêtements appropriés sont recommandés. De même, l’adaptation de leur durée et de leur intensité pour éviter une hyperthermie et le stress lié à la chaleur


QUELLE INTENSITÉ ?

La grossesse peut déjà être considérée en soit comme un sport d’endurance. Il est donc important de doser ses efforts et connaître ses limites. Tout excès peut entraîner des risques d’hypoxie, c’est-à-dire un manque d’oxygénation chez l’enfant. L’intensité recommandée est de faible à modérée. La femme enceinte doit toujours être capable de parler tout au long des exercices. Il est aussi important de penser à s’hydrater régulièrement avant, pendant et après les séances pour éviter un risque de déshydratation pour la maman et le bébé. Donc oui, on peut faire du renforcement musculaire et du cardio doux avec un objectif raisonnable et confortable. Ce n’est pas pendant la grossesse que l’on progresse, que l’on s’entraîne dur, que l’on y va à fond. Le sport pendant la grossesse c’est spécifique, et ça ne se prend pas à la légère.


COMBIEN DE FOIS PAR SEMAINE ET PENDANT COMBIEN DE TEMPS ?

Les scientifiques estiment que la femme enceinte devrait pratiquer au minimum 3 séances d’activités physiques par semaine, même si une pratique journalière est recommandée. En l’absence de complication médicale et obstétricale, la durée recommandée est minimum 150 à 180 minutes par semaine d’activité physique d’intensité modérée, réparties régulièrement au cours de la semaine. Une session d’activité physique doit durer, si possible au minimum, 10 à 15 minutes. Pour les femmes inactives, allez-y progressivement en augmentant au fur et à mesure la durée de vos sessions. Cette durée doit être adaptée à l’état de santé, à la condition physique et à l’évolution de la grossesse. Il est recommandé de ne pas dépasser 60-90 minutes par session, pour éviter une hyperthermie.



Le diabète gestationnel

Il se caractérise par un taux de sucre trop élevé dans le sang. La plupart du temps cette pathologie disparaît après l’accouchement. Les traitements médicamenteux contre le diabète sont contre-indiqués pendant la grossesse. La prise en charge consiste alors à suivre une alimentation équilibrée associée à une surveillance rigoureuse de la glycémie. Si la femme n’a pas de contre-indication, le fait de rester active permettra d’aider à réguler la glycémie. En cas de diabète plus sévère, une ou plusieurs injections d’insuline par jour seront peut-être nécessaires.




Sources : Lettre Information Diabète Santé du CeeD - Printemps 2020

https://www.has-sante.fr/jcms/p_3084460/fr/referentiel-de-prescription-d-activite-physique-etsportive-pendant-la-grossesse-et-en-post-partum

http://www.education.gouv.qc.ca/fileadmin/site_web/documents/loisir-sport/BrochureActivePourLaVie2019_WEB.PDF

https://www.federationdesdiabetiques.org/information/diabete-gestationnel

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